PROJET:
EHPAD mutualisé sur les rives du lac d’Annecy
ANNEE: 2015
L'insertion est le terme générique à la base de ma réflexion et de ma problématique qui a pris en compte les facteurs de territoire, de paysage et d'aspect sociétal pour aboutir à un travail de recherche que j’ai intitulé "Paysages emboîtés". Cette recherche m'a permis d'étudier les variations et interactions entre ces différentes dimensions qui composent une partie essentielle de la mission d'architecte. Selon Philippe Madec, "...une insertion réussie produit une architecture intégrée... ". Dans la teneur de ce propos mon projet s’implante en Haute-Savoie au bord du lac d'Annecy et plus précisément sur les rives du "petit lac". Le petit lac est la zone la plus sauvage du lac d’Annecy ou du moins qui essaie de conserver la tonalité qu’a réussi à engendrer la présence d’un parc naturel situé à l’extrémité sud du lac et qui se positionne entre le départ de la rive du soleil et une base nautique qui a bien failli engloutir l’aspect naturel de celui-ci. Ce parc reconnu nationalement depuis quelques années déjà comporte un parcours initiatique fort apprécié. La gestion de ce dernier est assurée par la société ASTER qui gère sur le territoire national de très nombreux espaces de ce type. Cette société rencontre cependant de nombreux problème tels que les limites de voisinage de ces parcs ou plutôt la manière de gérer les jonctions de limites de ces parcs ainsi que le manque d’observateurs et de rapporteurs.
Face aux années à venir, le papy boom se révèle être bien présent et nous oblige à envisager des structures d’accueil qui puissent faire face à ce monde de seniors grandissant. Mon projet se traduit donc dans une intention d’imaginer une structure d’accueil pour personnes âgées, mais qui puisse également accueillir les proches qui sont souvent très éloignés et en faire un espace de partage. Le lac d’Annecy reste localement une image très forte et très importante pour certains qui l’ont côtoyé toute une vie. Ce serait leur rendre hommage en essayant d’intégrer un tel établissement dans la périphérie et la jonction extérieure de ce parc naturel. L’ implantation d’un tel projet permettrait de créer une dimension aux multiples facettes tant dans sa forme architecturale, dans son facteur humain, dans le relationnel partagé, que dans la possibilité d’offrir aux résidents une fonction d’observateur, un rôle primordial qui permettrait d’apporter à ASTER ce retour dont elle a besoin. Le parc, d’une morphologie triangulaire, comporte actuellement deux accès au public: une entrée principale dotée d’un parking d’une cinquantaine de places et un accès par la plage du bout du lac qui fait partie intégrante de la base nautique. L’accès au parc est limité aux visites pédestres et ne tolère aucun véhicule ou autre deux roues.
L’implantation de mon projet permettrait d’envisager le troisième accès de ce triangle naturel et pourrait créer cette dimension de partage souhaitée au travers d’une esplanade qui surplomberait une partie de l’espace protégé, créant ainsi un niveau uniforme pour la circulation des résidents et permettant également de prolonger un concept existant au travers du parcours initiatique existant suspendu. Cette esplanade serait en retrait de la rive, conservant ainsi la présence des roselières qui sont l’emblème de ce parc et le symbole du lac.
Les espaces environnants de mon projet contribuent à la dimension de partage local, autrement dit les plateformes de pêche, la salle polyvalente, le kiosque, la volière et les serres sont autant d’espaces partageables pour les visiteurs lointains que les habitants des communes riveraines. La présence de la base nautique à l’opposé du parc naturel contribue bien évidemment à une dimension de plaisir qui va s’ajouter au devoir d’aller rendre visite à un parent.
Le bâtiment, imaginé de manière simple et qui reprend la symbolique de la maison, se compose de deux niveaux et d’un niveau combles sous toiture. Les deux niveaux inférieurs sont attribués aux fonctions de l’établissement d’accueil des résidents et le niveau sous toiture accueillera des studios destinés à héberger temporairement les familles de résidents qui sont éloignées.
La matérialité de mon projet, qui veut traduire l’esprit d’un village lacustre, reprend des matériaux comme le zinc à joints debout pour le bâtiment principal, du métal corten pour le kiosque, du bois à l’identique de l’esplanade pour la salle polyvalente, du polycarbonate pour la serre. La structure globale des bâtiments est identique et s’articule sur des portiques métalliques qui déterminent dans leur succession cette forme brisée et linéaire rappelant la symbolique de la maison, pour créer ainsi l’émotion originelle.
L’intention de ce projet est de permettre de mettre en évidence le schéma d’un emboîtement paysagé à la fois sur la forme topologique, architecturale, humaine, avec un positionnement et une posture intergénérationnelle. Il s’agit aussi de permettre aux résidents de rester dans le territoire rural qui leur est familier tout en jouissant d’un environnement paysagé de qualité, qui fait partie de leur patrimoine local.
Au travers d’une spatialité novatrice et d’une implantation circonstanciée, le rapport des sites peut devenir une continuité architecturale avec du sens, créant ainsi des liaisons interactives qui « dialoguent » entre elles. Ainsi, le fait d’implanter une maison de retraite à proximité d’un parc naturel permet une transition douce vers la densité constructive.
Ce projet de maison de retraite avec un service d’hébergement lié veut rendre hommage aux personnes âgées actuelles et à celles de demain.